Je n’avais jamais télétravaillé auparavant, alors que j’en rêvais ! Cela n’était pas possible pour les opérateurs de marché, pour des raisons de compliance (sécurité, confidentialité, délit d’initié, etc). Mais début mars, l’AMF (autorité des marchés financiers) a indiqué qu’aucune disposition n’interdit le télétravail pour nous, à condition d’organiser autrement le respect de ces exigences. J’espère que cela pourra perdurer lorsque la crise sera passée, mais je ne me fais pas trop d’illusions.
Je vis en couple sans enfant et je travaille dans le salon, dans un appartement suffisamment grand pour que cela ne soit pas pénible. J’ai pu acheter, sur note de frais, un écran supplémentaire, ce qui fait qu’au niveau matériel, je suis assez proche de mon installation au bureau. Je n’ai pas de douleurs particulières, d’autant que j’échappe à la plupart des réunions en visio, que je me lève naturellement souvent, et fais en plus du sport matin, midi et soir.
Nous travaillons sur ce qu’on appelle “la platine”, qui enregistre toutes nos conversations. Je suis un peu plus aux aguets qu’en temps normal, puisque tout passe par le son, au lieu des contacts visuels qu’on a dans l’open-space. On doit s’organiser pour qu’il y ait toujours quelqu’un pour répondre et donc prendre si nécessaire le relais d’un collègue qui serait momentanément accaparé par ses enfants, par exemple.
Les marchés sur lesquels je travaille étant au ralenti, mon activité est plus calme que d’habitude. Tout le monde a dû poser des jours de congé, ce qui aurait pu entraîner une surcharge sur certains collègues ; ce n’est pas le cas, car nous ne sommes pas en sous-effectifs. Je travaille dans une équipe qui fonctionne bien en temps normal, ça fonctionne bien là aussi. Je sais que mon boss a suivi un atelier de formation au début du confinement, notamment pour que les managers intègrent bien le fait que, dans la situation actuelle, tout le monde n’aura pas le même rythme de travail. Cela va dépendre d’où on est, de la situation familiale, du matériel et de la connexion que l’on a… Inutile de faire du flicage et de vouloir donner la même charge de travail à tous.
Le service com nous envoie régulièrement des mails “faire du sport”, “gestion des émotions et confinement”, “équilibre vie privée – vie pro”… Des trucs bateau. J’avoue que je n’ai pas eu la curiosité de les lire, parce que je ne me sens pas concerné. Vers 18 heures, je claque mon ordi et c’est fini, je n’ai pas de mal à déconnecter. Bon, la tentation est forte de se prendre tous les soirs une bière après le boulot. Ici, on a fixé une règle : pas avant 20h15, après les applaudissements aux soignants. Cela ne m’inquiète pas, mais il faut bien reconnaître que pour les apéros, les barrières que l’on se met d’habitude – pas en début de semaine, pas tous les soirs, etc – ont sauté.